Parler du film japonais En boucle sans vous retenir ici plus de deux minutes, c’est possible ? Essayons. Trois ans après Beyond the Infinite Two Minutes, sorti en 2020, le réalisateur Junta Yamaguchi et le scénariste Makoto Ueda explorent à nouveau le sujet de la distorsion temporelle. Cette fois, le personnel et les clients d’un ryokan de la région de Kyoto se retrouvent à vivre une succession de boucles d’environ deux minutes. Une fois le sablier vide, chacun revient à l’endroit où il se trouvait au commencement de l’incident. Contrairement à un autre film nippon partant du même principe, Comme un lundi de Ryo Takebayashi, les personnages prennent tout de suite conscience du problème. Et joignent donc leurs forces pour trouver la clé du mystère.
Chaque boucle est un plan-séquence qui nous emmène dans les artères de l’auberge et dans son voisinage immédiat. Pas facile d’aller bien loin en deux minutes… Une fois le dispositif installé, l’on revoit fatalement plusieurs fois les mêmes choses, mais le film fait son possible pour donner sa place à chaque protagoniste et exploiter le potentiel de son concept. Comme avec ces réunions que chacun doit rejoindre de son point de départ, limitant d’autant le temps imparti à la discussion…
Les boucles temporelles ont le don de révéler ce que l’on néglige d’ordinaire. Les allées et venues contraintes par le temps des employés illustrent en accéléré l’envers de ces métiers où le client est roi. À court de banalités à échanger, leur rôle dans la société suspendu, les personnages n’ont d’autre choix que d’oser la franchise pour débloquer ce qui les empêche d’avancer. Faire sa thérapie par tranches de deux minutes, voilà qui ferait enrager les psychanalystes ! C’est pourtant ce que propose En boucle. C’est aussi, peut-être, où il pèche, le format réduisant selon moi l’attachement aux personnages et la portée émotionnelle de leurs préoccupations. Exception faite du vieil écrivain, empêtré dans son roman-feuilleton, plus touchant – et drôle – que les autres. C’est bien la résolution de l’énigme qui tient le spectateur en haleine. À vous d’en devenir un à partir du 13 août, ne serait-ce que pour soutenir un film plaisant, vraiment pas comme les autres, et sa belle affiche.