Année : 2025

  • Karl Lagerfeld x Sushio

    Qu’est-ce qui m’a intéressé cette semaine ?

    Pourquoi Japan Expo stagne. Certes, je trouve toujours de quoi m’occuper à la reine des conventions (3, 4 jours à Villepinte, 8 juillet 2025). Mais serait-elle devenue allergique à la nouveauté ? Un constat nécessaire.
    Néant Vert ↗

    Les Deftones de retour. Il suffisait que je les mentionne pour que ça arrive (And all that could have been, 9 juillet 2025). Le groupe de metal californien vient de sortir My Mind Is a Mountain, premier morceau issu de son nouvel album Private Music, attendu le 22 août. Un concert est prévu le 26 janvier à l’Adidas Arena, à Paris. Prévente mercredi 16 juillet et vente générale le vendredi qui suit.
    Pitchfork ↗ (en anglais), AEG Presents ↗

    Sushio dans la colle. Le dessinateur et animateur japonais Toshio Ishizaki, associé au studio Trigger (Kill la Kill) et plus connu en tant que Sushio, a supprimé une série de messages dans lesquels il apportait son soutien à une candidate d’extrême-droite pour l’élection à la Chambre des conseillers.
    Anime News Network ↗ (en anglais)

    Karl Lagerfeld dessiné. Le couturier allemand était un as du croquis. Le voilà croqué à son tour par Simon Schwartz dans un roman graphique et biographique, inspiré du livre du journaliste allemand Alfons Kaiser (non traduit en français) Ein Deutscher in Paris. Déjà disponible en Allemagne, Karl Lagerfeld arrivera en France le 19 septembre chez Huginn & Muninn, selon sa fiche sur les sites de vente en ligne.
    SWR ↗ (en allemand), Amazon.fr ↗

    La suite pour Perfume. Le trio d’electro-pop japonais revient le 17 septembre avec la deuxième partie de son album-concept Nebula Romance. Ça, c’est si vous achetez le CD, mais les dix titres – du moins, ceux qui n’auront pas déjà fait l’objet d’un single – seront disponibles en streaming dès la mi-août. Un nouveau titre, Meguri Loop, vient d’ailleurs de sortir.
    Site du groupe ↗ (en anglais)

    Poiret et Worth. Jolie exposition consacrée au couturier français Paul Poiret et à la maison du même nom au Musée des Arts décoratifs, à Paris. On y trouve même ses parfums, ce qui m’a forcément réjoui. Hasard du calendrier, le Petit Palais propose lui de découvrir la maison Worth, par laquelle Paul Poiret est lui-même passé. Fin le 11 janvier 2026 et le 7 septembre 2025, respectivement.
    Musée des Arts décoratifs ↗, Petit Palais ↗

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  • Deux minutes pas plus

    Parler du film japonais En boucle sans vous retenir ici plus de deux minutes, c’est possible ? Essayons. Trois ans après Beyond the Infinite Two Minutes, sorti en 2020, le réalisateur Junta Yamaguchi et le scénariste Makoto Ueda explorent à nouveau le sujet de la distorsion temporelle. Cette fois, le personnel et les clients d’un ryokan de la région de Kyoto se retrouvent à vivre une succession de boucles d’environ deux minutes. Une fois le sablier vide, chacun revient à l’endroit où il se trouvait au commencement de l’incident. Contrairement à un autre film nippon partant du même principe, Comme un lundi de Ryo Takebayashi, les personnages prennent tout de suite conscience du problème. Et joignent donc leurs forces pour trouver la clé du mystère.

    Chaque boucle est un plan-séquence qui nous emmène dans les artères de l’auberge et dans son voisinage immédiat. Pas facile d’aller bien loin en deux minutes… Une fois le dispositif installé, l’on revoit fatalement plusieurs fois les mêmes choses, mais le film fait son possible pour donner sa place à chaque protagoniste et exploiter le potentiel de son concept. Comme avec ces réunions que chacun doit rejoindre de son point de départ, limitant d’autant le temps imparti à la discussion…

    Les boucles temporelles ont le don de révéler ce que l’on néglige d’ordinaire. Les allées et venues contraintes par le temps des employés illustrent en accéléré l’envers de ces métiers où le client est roi. À court de banalités à échanger, leur rôle dans la société suspendu, les personnages n’ont d’autre choix que d’oser la franchise pour débloquer ce qui les empêche d’avancer. Faire sa thérapie par tranches de deux minutes, voilà qui ferait enrager les psychanalystes ! C’est pourtant ce que propose En boucle. C’est aussi, peut-être, où il pèche, le format réduisant selon moi l’attachement aux personnages et la portée émotionnelle de leurs préoccupations. Exception faite du vieil écrivain, empêtré dans son roman-feuilleton, plus touchant – et drôle – que les autres. C’est bien la résolution de l’énigme qui tient le spectateur en haleine. À vous d’en devenir un à partir du 13 août, ne serait-ce que pour soutenir un film plaisant, vraiment pas comme les autres, et sa belle affiche.

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  • Humaine après tout

    Il y a un mois, la musicienne et autrice Michelle Zauner apparaissait dans un spot publicitaire pour les téléphones Pixel de Google. Née à Séoul d’une mère sud-coréenne, la chanteuse de Japanese Breakfast y évoquait son immersion en Corée du Sud motivée par l’écriture de son deuxième livre. Une séquence avait fait réagir : elle la montrait demander à Gemini, le chatbot de Google, des conseils pour échauffer sa voix, dans le but d’enregistrer une reprise. S’il s’agissait de vanter les qualités d’assistant personnel de l’intelligence artificielle de Mountain View, plus que de lui demander de « créer » lui-même une chanson, de nombreux fans ont néanmoins exprimé leur déception dans les commentaires de la publication. Voici dans quel contexte je me suis rendu mardi au concert de Japanese Breakfast au Trianon ; vaguement gêné, mais quand même impatient. J’en suis ressorti avec la conviction que l’humain avait encore de beaux jours devant lui.

    Car c’était magnifique, voilà tout. Des morceaux superbes, une chanteuse au top, un public subjugué, et surtout, pas une trace d’IA à l’horizon. Il y a des choses qu’on ne peut faire qu’avec le coeur, la tête et les mains. Et des émotions qu’on ne peut ressentir qu’en présence du talent des autres. Est-ce que Gemini peut générer quelque chose d’aussi adorable que l’émotion de Minhwi Lee, remobilisant en première partie ses (beaux) restes de français pour communiquer avec nous ? Minhwi Lee qui s’essaye à chanter dans notre langue, son aide-mémoire posé sur le clavier ? Minwhi Lee et sa touchante lettre de remerciement à Michelle Zauner, écrite en français par peur de l’embarras ? Et, puisqu’on parle quand même musique, Minhwi Lee et sa douce voix chuchotée posée sur une guitare tendre et mélancolique ? Je ne pense pas. Il fallait être là, à Paris, spécifiquement, pour vivre ces moments qui ne pouvaient avoir de sens qu’ici. Les autres spectateurs, sur les autres dates, en ont vécu d’autres, sans aucun doute. Mais le hasard de cette rencontre, de ces retrouvailles, avec une ville, une langue, illustrait toute la beauté éphémère de l’expérience humaine, impossible à imiter et accessible seulement en vivant.

    L’album For Melancholy Brunettes (& Sad Women) a ajouté de beaux morceaux au répertoire de Japanese Breakfast, dont nous avons largement profité ; le concert a d’ailleurs commencé avec ses trois premiers titres. Here Is Someone était du plus bel effet, Honey Water, quant à lui, sonnait un peu différemment de ce que j’espérais. Pas grave, le très beau Little Girl et le verre de vin sur Men in Bars ont rattrapé le coup. Jubilee était également présent en majesté ; Slide Tackle fait sans doute partie de mon top 3 du groupe, Posing in Bondage était aussi beau qu’intense, et que dire de l’enchaînement de Paprika et Be Sweet en rappel, un moment magique. Le concert fini, je ne pensais plus à cette histoire de publicité et d’IA. Était-ce une faute, pour une artiste, de tourner ce spot ? Peut-être. Il n’empêche que cette soirée était la plus belle vécue depuis longtemps.

    Michelle Zauner, chanteuse de Japanese Breakfast, au Trianon

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  • And all that could have been

    En 2007, j’ai vu beaucoup de mes idoles de jeunesse. Marilyn Manson, Anathema, Dream Theater, Deftones… Belle année. Presque 10 ans plus tard, en 2016, j’ajoutais KoRn à mon tableau de chasse. Nine Inch Nails était le dernier groupe à m’échapper encore… Jusqu’à lundi. Alors que je croyais Trent Reznor occupé à ses bandes originales, voilà qu’il se lançait dans une tournée intitulée Peel it back, laquelle devait évidemment passer par Paris. Il m’aura donc fallu attendre 2025 pour que se produise la rencontre tant attendue. Alors ?

    Arrivé dans la fosse de l’Accor Arena, j’ai constaté qu’un cube entouré d’un drap noir se trouvait en plein milieu. J’ai décidé de me planter non loin, et bien m’en a pris. Le set de l’allemand Boys Noize fini (pas mon genre d’electro, malheureusement), NIN a tout de suite pris les commandes, révélant la raison d’être du monolithe. Assis devant son clavier se trouvait Trent Reznor, de dos, de mon point de vue, mais Trent Reznor quand même, offrant sa voix pure à un public subjugué qui avait tu la sienne. L’endroit allait servir une fois de plus à l’occasion de remix techno de morceaux post-The Fragile (Sin mis à part) en duo avec Boys Noize. Mais pour moi, le plus intéressant s’est déroulé sur la scène principale.

    C’est là que le groupe a enchaîné les tubes, avec une attention particulière pour The Downward Spiral. 31 ans après la sortie de l’album, l’hommage que semblait annoncer le nom de la tournée a bien eu lieu. J’en retiens notamment un Reptile proprement gigantesque, d’une épaisseur tétanisante, du jamais entendu en concert pour ma part. Aucune vidéo, aussi bien filmée soit-elle, ne peut transmettre les sensations ressenties à ce moment-là. Et que dire Heresy, autre bombe métal indus de la galette, dont le refrain a soulevé la fosse ? Un plaisir pour moi, qui admet un faible pour ces deux titres et pour Eraser (absent celui-là), plus que pour Closer par exemple, qui m’a lassé car trop entendu. Et Ruiner au piano ? Pourquoi pas.

    La scénographie, avec ces projections si grandes qu’elles faisaient passer les musiciens pour des fourmis, et ces lumières suspendues qui plongeaient la fosse dans un halo coloré, ne m’a pas déçu. De Nine Inch Nails, on attend autant de la musique que du spectacle, et j’ai trouvé le résultat très classe. L’énergie positive de la foule autour de moi, certes dynamique mais sans partir dans tous les sens, m’a permis d’apprécier le show sans être ballotté. Un autre temps fort ? Head Like a Hole, sans hésiter, seul représentant de Pretty Hate Machine avec Sin. Le grand absent de cette soirée fut The Fragile, enterrant mon rêve de frissonner sur The Great Below. J’aurais bien échangé l’un des morceaux récents avec celui-là. Pensez qu’à Zurich, ils ont eu droit à La Mer et Even Deeper. Mais pas Reptile… C’est le jeu des setlists changeantes. Et rien que pour ce moment mémorable, je trouve finalement le tirage favorable. Et j’ai un nom en moins sur ma liste de choses à voir.

    Le leader de Nine Inch Nails Trent Reznot à l'Accor Arena

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  • 3, 4 jours à Villepinte

    Chaque mois de juillet, rien à faire, je me retrouve à Japan Expo. J’ai une certaine affection pour cet événement dont les défauts sont pourtant nombreux, mais qui a le mérite de vous faire penser à tout autre chose l’espace d’un moment, surtout si vous enchaînez les quatre jours (du 3 au 6 juillet cette fois-ci).

    Alors, qu’est-ce que j’ai aimé et moins aimé dans cette édition 2025 ? C’est l’heure du bilan.

    Le meilleur :

    Junji Ito. D’aucuns l’avaient déjà vu au festival d’Angoulême, mais pour moi, c’était une première. J’ai assisté à sa conférence et au live drawing. Je retiens surtout ce second événement, qui m’a fait comprendre combien cet auteur à la popularité désormais immense comptait pour moi. Voir une Tomie naître sous vos yeux, ça n’a pas de prix. Planning chargé oblige, j’ai malheureusement rushé l’exposition, dont j’ai cependant bien aimé le coin plongé dans le noir. Après tout, on est là pour avoir peur, non ?

    Youth Theatre Japan. Hasard ou coïncidence ? Cette troupe de jeunes acteurs et danseurs venus de tout le Japon proposait cette année un spectacle musical horrifique dans lequel une poupée sortie d’un temple fait apparaître une spirale violette transformant les lycéens en zombies… Cela fait beaucoup de spirales en une édition. C’était taillé pour moi, et, sans surprise, j’ai adoré. Léger doute sur les illustrations projetées en fond de scène, mais à part ça, rien à redire.

    Le cinéma live existe. Japan Expo accueillait cette année deux réalisateurs officiant dans le domaine du cinéma en prises de vues réelles, Koji Fukada et Shunji Iwai. Si je n’ai pas assisté à tous les événements en rapport avec leur venue, j’ai trouvé ça bien de proposer autre chose que de l’animation, pour changer.

    Les annonces. Rien de plus sympa que d’avoir la primeur d’infos croustillantes. La nouvelle adaptation animée des oeuvres de Junji Ito, son futur manga basé sur le roman Moby Dick, le nouvel animé Chocola et Vanilla… Le public de Japan Expo mérite donc de savoir avant tout le monde. Tant mieux pour nous.

    La troupe Youth Theater Japan lors du spectacle Purple Spiral à Japan Expo

    Le moins bien :

    La musique. Broken By The Scream ? Super. Mais 30 minutes ? Sur la scène Tsubamé ? Dommage pour ce qui était pour moi l’annonce la plus excitante de l’année. J’ai apprécié le retour de Yukka, toujours aussi souriante et dynamique, et la présence d’une formation rock complète, en l’occurrence Haita Amatubu. J’ai moins été emballé par les autres groupes d’idols, mais j’ai aussi vu peu de concerts en raison de mes choix de planning. Et l’événement J-music, les groupes Exile Tribe, n’était juste pas dans mes cordes. Chapeau par contre à l’Amazing K-pop Show, très solide (pas de Whiplash, certes, mais il y avait Butterfly de Loona, alors…).

    Les sollicitations. Japan Expo est à moitié responsable. La dame qui m’a proposé des cartes postales pour aider les enfants défavorises à participer à la convention ? J’ai réussi à la saouler suffisamment pour qu’elle parte en quête d’une autre victime, mais je n’ai pas été ravi de voir que cette arnaque existait toujours. Là où l’organisation doit agir, en revanche, c’est pour ne pas reprendre le stand de vestes en cuir, qui en plus de pratiquer un démarchage agressif des visiteurs, est accusé de cacher un autre type de business.

    Arbre : 1, RER : 0. Quand nous avons été redirigés vers un hall vide à la fin de la convention dimanche, ça sentait déjà l’embrouille. Un tour sur X, et je vois qu’un arbre est tombé sur les voies du RER B, interrompant la circulation jusqu’à 21 heures. Il était environ 18h15. Les plus pressés ont accepté de s’entasser dans des bus. Certains, comme moi, ont eu la chance de prendre dès 20 heures un RER bloqué à Charles de Gaulle faisant le trajet dans l’autre sens. Sacrée conclusion.

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