Année : 2025

  • Coil x Kyary Pamyu Pamyu

    Qu’est-ce qui m’a intéressé cette semaine ?

    Double censure. Le retrait de certains jeux pour adultes de la boutique en ligne de jeux vidéo Steam a récemment créé la polémique. Dans deux articles, Vice a mis en avant la responsabilité d’une organisation en lien avec des mouvements anti-porno conservateurs. Ironie de l’histoire, le média les a ensuite retirés. Si cela arrive généralement quand l’exactitude des faits rapportés est remise en cause, l’autrice assure que ce n’est pas le cas ici. Lisez vous-même.
    Bluesky ↗ (en anglais)

    Kyary nous fait danser. La chanteuse japonaise Kyary Pamyu Pamyu a révélé vendredi son nouveau morceau, Kuru Kuru Harajuku, que j’ai déjà envie d’écouter en club ou en concert. Après Candy Racer sur l’album du même nom, c’est un nouveau bop à mettre au crédit de la princesse d’Harajuku.
    JaME ↗ (en anglais)

    Mad Movies en deuil. Le fondateur du magazine du cinéma de genre, Jean-Pierre Putters, est mort à l’âge de 79 ans. Un hommage lui sera rendu dans le numéro de rentrée, a promis le mensuel.
    Mad Movies ↗

    De la musique en mots. Les prochains ouvrages à rejoindre la collection anglophone 33 1/3, consacrée aux albums cultes, ont été révélés. En tant que fan du groupe et de musique industrielle en général, j’attends impatiemment l’opuscule consacrée à Horse Rotor Vator de Coil.
    Bluesky ↗ (en anglais)

    Isao Takahata honoré. La maison de la culture du Japon à Paris va rendre hommage à partir du 4 octobre à la figure du studio Ghibli, disparue en 2018. Exposition, rétrospective et conférences vont se succéder jusqu’à l’année prochaine.
    Maison de la culture du Japon à Paris ↗

    Un groupe de NK-pop. Un nouveau boys band qui se lance en Corée du Sud, c’est banal. Ça l’est moins quand celui-ci compte deux transfuges nord-coréens parmi ses membres. Voici 1VERSE.
    Reuters ↗ (en anglais)

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  • La danse des trépassés

    La Cinémathèque française consacrait dernièrement une rétrospective au réalisateur italien Antonio Margheriti. Un inconnu pour ma part, mais la présence de films de genre m’a poussé à m’y intéresser. Horreur gothique, science-fiction, polar… Si j’ai aussi exploré la deuxième, c’est de la première catégorie dont nous allons parler ici, avec Danse macabre, sorti en 1964 et récemment remasterisé en 4K. Tout commence par une interview, qu’un journaliste du Times espère décrocher auprès d’Edgar Allan Poe. Quand il trouve enfin l’écrivain, ce dernier conte une histoire d’épouvante à un ami dans une taverne londonienne. La discussion s’engage, et le journaliste, campé par le Français Georges Rivière (La Vierge de Nuremberg du même réalisateur), confie ne pas croire à l’existence du surnaturel. L’occasion pour Lord Blackwood, attablé avec eux, de lui proposer un défi : survivre dans son vieux château à la nuit des trépassés, qui voit les défunts reprendre forme humaine pour mourir à nouveau…

    En 1959, dans La Nuit de tous les mystères de l’américain William Castle, Vincent Price promettait 10 000 dollars à cinq personnes pourvu qu’elles passent la nuit dans une maison hantée. Ici, le pari entre Lord Blackwood et le journaliste, Alan Foster, s’élève d’abord à 100 livres avant d’être réduit à 10 eu égard à la précarité de sa profession. Laissé seul au château pour relever le challenge, notre envoyé spécial aux frontières de la vie et de la mort est témoin d’étranges occurrences qu’il tente de rationaliser. C’est alors qu’il rencontre Elisabeth Blackwood, soeur de, interprétée par la Britannique Barbara Steele (La Sorcière sanglante, idem), avant que d’autres occupants ne se manifestent à leur tour. Le jeu peut alors commencer.

    Comme dans la maison du 7bis rue du Nadir-aux-pommes de Céline et Julie vont en bateau, de Jacques Rivette, où les mêmes scènes sont rejouées sans cesse par des acteurs fantômes, les morts reviennent chaque année à la même date reproduire les circonstances de leur trépas. Deux mouvements se succèdent : d’abord introduit aux événements par les revenants, Alan Foster les voit ensuite se dérouler sous ses yeux. Dans le même temps, il s’éprend de la troublante Elisabeth, dont le corps chaud semble traduire la vie, et voit sa raison le quitter. Portes qui claquent, cadavres qui respirent, tableau ondoyant, fumées inquiétantes, Antonio Margheriti use de tous les subterfuges pour susciter l’angoisse. Des effets assez réussis qui profitent du noir et blanc, qui fait des merveilles lors de l’arrivée au château. Si l’on peut rouler des yeux face au personnage du journaliste, pas avare de niaiseries pour séduire sa belle, celle-ci fait office de figure tragique, désespérée de revenir à la vie par l’amour. Un sujet plus intéressant, à mon goût, que ne le sont les raisons de sa mort et de celle des autres. Dommage aussi que Lord Blackwood, initiateur de ce jeu pervers, reste condamné au rôle d’élément déclencheur. Pourquoi envoyer ainsi des gens à leur fin ? Par simple plaisir de gagner 100 livres ? Si Danse macabre n’est pas La Maison du diable ou La Chute de la maison Usher, la présence de Barbara Steele, des effets efficaces et un climax réussi, en font un bon visionnage. Sans oublier la restauration, dans la version 4K, de scènes sulfureuses autrefois censurées.

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  • Être et paraître

    Un jour de novembre 1954, deux jeunes pousses de la mode posaient timidement au côté de modèles portant leur création. Ils avaient participé au concours du Secrétariat international de la laine, et avaient chacun gagné un premier prix : l’un, dans la catégorie manteau, et l’autre, également titulaire du troisième, dans celle des robes. Une certaine Colette Bracchi s’était également illustrée dans le domaine des tailleurs. D’elle, on ne se souvint pas ; venus d’Allemagne et d’Algérie, ses deux colauréats, comme rassemblés par le destin, portaient en revanche des noms bientôt inscrits dans l’histoire de la mode française : Karl Lagerfeld et Yves Saint Laurent.

    C’est leur trajectoire que raconte en près de 400 pages le désormais célèbre livre d’Alicia Drake The Beautiful Fall : Fashion, Genius and Glorious Excess in 1970s Paris (Beautiful People – Saint Laurent, Lagerfeld : splendeurs et misères de la mode chez Folio), bible des passionnés de mode, attaqué par Karl Lagerfeld à sa sortie en 2006 pour atteinte à la vie privée. La journaliste britannique y raconte sur un peu plus de 30 ans la montée en puissance, puis le règne des deux couturiers, tout en étudiant leur psychologie et leur milieu, aboutissant à un récit passionnant où se mêlent art, argent, goût pour la fête et égos bien trempés. De nombreux témoignages donnent à l’ouvrage sa richesse : Pierre Bergé, Gabby Aghion, Betty Catroux, Diane de Beauvau-Craon, la famille de Bascher… Seules les deux figures centrales manquent à l’appel, mais si leur collaboration aurait enrichi l’ensemble, celui-ci ne manque pas de matière.

    Le livre The Beautiful Fall d'Alicia Drake chez Bloomsbury

    Leur premier prix en poche, Karl Lagerfeld et Yves Saint Laurent ont ensuite fait leur chemin dans le monde de la mode parisienne. Le premier (en résumé) chez Chloe, puis Fendi, avant de prendre le pouvoir chez Chanel ; le second chez Christian Dior, auquel il aurait sans doute succédé s’il n’avait pas été évincé, avant d’ouvrir la maison qui porte son nom. D’abord amis, ils se sont éloignés, entourés chacun par leur clan dont les membres évitaient de se mélanger. Une règle que l’autre personnage majeur de ce récit avait bouleversée : Jacques de Bascher, compagnon de Karl Lagerfeld, dont Yves Saint Laurent tomba amoureux. Qualifié de gigolo par certains, il était haï par Pierre Bergé et tenu responsable de la descente aux enfers du couturier. Pierre Bergé qui n’aimait pas beaucoup plus Karl Lagerfeld et tenait Yves Saint Laurent comme le seul créateur contemporain digne d’intérêt. Karl Lagerfeld qui, en 1984, fera scandale en s’en prenant à son ancien ami dans les colonnes d’Actuel

    Car lire The Beautiful Fall, c’est passer sans transition du nadir de la couture à la plus odieuse mesquinerie. L’on y découvre comment Yves Saint Laurent était déifié par son entourage, les femmes étant tenues à la perfection pour paraître devant lui. Et comment Karl Lagerfeld brisait en un mot assassin des relations, personnelles ou professionnelles, vieilles de plusieurs années. Alicia Drake n’oublie cependant pas d’humaniser ces personnages bigger than life, à travers leurs blessures. Pour Yves Saint Laurent, la dépression, couplée à l’abus de substances diverses. Pour Jacques de Bascher, la peine de n’avoir rien créé, lui qui n’a fait que vivre aux crochets de Karl Lagerfeld. Et pour ce dernier, la mort de son compagnon, emporté par le Sida, qui viendra mettre fin à la fête permanente dans laquelle s’oubliait tout un milieu. Chute moins belle que triste d’un voyage stupéfiant au coeur du glamour.

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